Disparition de Richard Mitou
La disparition de Richard Mitou est un bouleversement dans la vie théâtrale de Montpellier. Cet homme avait adopté la ville, depuis sa formation jusqu’à sa carrière, il a fait le choix de s’y établir durablement et il en était indissociable. Pourtant, son talent, sa sensibilité et son travail auraient pu lui ouvrir les portes de la capitale.
Je me souviens du premier contact avec le metteur en scène. C’était en 2005, j’étais âgé de 18 ans. Richard Mitou travaillait sur « Les Histrions » de Marion Aubert. Une pièce qui a connu une belle tournée, jusqu’au prestigieux festival d’Automne de Paris. Mitou avait eu l’idée de faire appel aux troupes régionales de théâtre amateur pour recruter des figurants. Membre d’une de ces troupes, j’ai eu la chance de participer à l’aventure. Face à ces nombreux participants, le metteur en scène était timide. Il confessait presque son idée saugrenue de placer les figurants comme des gens du public. Sa courtoisie et sa patience envers ces personnes qui n’étaient pas du métier étaient touchantes.
En tant que journaliste, j’ai retrouvé Richard Mitou à la direction d’acteur. Mes plus grands souvenirs restent ses deux créations collégiales du Printemps des Comédiens, « Les règles du savoir-vivre dans la société moderne » de Lagarce (2011) et « Les Numéros Cabaret » d’après Hanokh Levin (2012). Deux spectacles jeunes, fougueux, deux manifestes pour une vie moderne, sauvage et libre.
Manifeste aussi, car Mitou voulait montrer qu’il pouvait créer un lien fort avec les jeunes élèves du conservatoire. En les dirigeant dans ces spectacles du Printemps, il prouvait qu’il était capable de prendre les rennes de l’école d’art dramatique de la rue Lallemand. À ce qu’il se dit dans les rues de la ville, il s’en sortait très bien et se montrait excellent pédagogue.
Je me souviens aussi de son contact avec le public. Seul, sous la pinède du domaine d’O. Passant de table en table, interrogeant les spectateurs sur sa dernière création, léger en apparence, mais intérieurement sensible à chaque mot.
Aussi, n’oublions pas l’acteur qu’il était. Je n’ai pas eu la chance de le voir dans « Radio Clandestine ». Ce spectacle fait pourtant partie des rares travaux où les avis sont unanimement positifs. Je l’ai vu en frère fou, suant de folie et de désespoir ironique dans le « Déjeuner chez Wittgenstein » de Thomas Bernhard mis en scène par Fréderic Borie. Je me souviens de la sortie du théâtre Jean Vilar où j’étais sonné, effrayé par ce personnage. Je regrettais alors qu’il ne joue pas plus souvent.
Richard Mitou, dans sa vie artistique (la seule que je connaissais un peu), était un homme complet, passionné, vivant. Sa disparition chamboule ce monde culturel local en pleine mutation. Il laisse un vide immense derrière lui. Il nous a quittés le 3 janvier. Sa famille, ses amis, Montpellier et ses alentours ont perdu un être cher et valeureux.
(Crédit photo de une © Marie Clauzade)