Mises en Je met en scène “Huis clos” en intégralité
Les 6 et 7 mars prochains, à la Maison pour Tous Georges Brassens, l’association Mises en Je présente la pièce Huis Clos de Jean-Paul Sartre, en texte intégral. Le Nouveau Montpellier a assisté à une répétition en conditions réelles, de quoi se faire une idée sur ce qui attend le public.
Des choix artistiques pour plus d’imagination du public
Nul besoin de présenter Huis Clos, cette pièce de théâtre écrite en 1944 et jouée sûrement des milliers de fois depuis. Difficile de se démarquer et d’innover dans ces conditions. La compagnie Mises en Je propose sa version et son interprétation avec des choix qui se démarquent du classicisme auquel on peut s’attendre.
Le décor est blanc, neutre, les fauteuils semblent peu confortables et très rigides. Les comédiens portent également des couleurs neutres malgré l’élégance de leurs costumes. La lumière composée par Sébastien Lefeuvre n’est pas achevée lors de la répétition à laquelle nous assistons, mais déjà des éléments simples apparaissent efficaces.
Jeanne Dessart, une des comédiennes jouant Inès Serrano, revient sur le choix assumé de ce décor : « C’était voulu que ça ne soit pas confortable. À partir du moment où l’on a eu le décor, on a joué vraiment autrement. On a mis six mois à choisir la forme des fauteuils, c’était très important. » C’est elle-même qui a fabriqué les fauteuils à l’aide de cartons agglomérés et sculptés. Dans la pièce, le salon est de style Second Empire, ce qui tranche avec les panneaux blancs que l’on voit en fond de scène.
Quant aux costumes, Patie Flecher, tenant le deuxième rôle féminin – celui d’Estelle Rigault – explique que les couleurs neutres étaient voulues : « Nous voulions laisser la place à l’imaginaire du spectateur, ne rien imposer. » Car en effet, les couleurs des tenues et des meubles sont annoncées par Jean-Paul Sartre dans les écrits.
De son côté, Frédéric Perchet, troisième comédien de la pièce, se vante que sa tenue a été validée dès le premier essayage. Il s’agit d’un costume trois pièces, gris, qui feint bien le gentleman que Joseph Garcin n’est pas mais prétend être.
L’origine du projet
L’idée de monter ce projet vient des deux comédiennes, Patie et Jeanne. Mais il leur fallait un comédien de plus, raison pour laquelle elles se sont adressées à deux hommes qui leur paraissaient appropriés pour le rôle de Joseph Garcin. Si l’un leur a dit en toute franchise que leur projet était sur du trop long terme et qu’il ne souhaitait pas s’engager, l’autre était tout de suite partant. Patie explique : « Fred n’a pas d’expérience en théâtre mais il a l’expérience de la scène. » En effet, depuis une dizaine d’années, Frédéric Perchet, chanteur et guitariste, est monté sur de nombreuses scènes montpelliéraines. « En plus, il n’avait jamais lu la pièce avant, son regard a été très intéressant » poursuit Patie.
“Fred” a pu bénéficier de l’expérience de Patie et de Jeanne pour la pièce. De quoi avoir une formation très accélérée car les comédiennes ont déjà de l’expérience tant sur scène que devant une caméra. Jeanne sort de la formation dispensée par la Compagnie Maritime tout en ayant eu de nombreux projets à côté, des courts aux longs-métrages en passant par la web-série. Patie, formée au programme Acting de l’Ecole de Cinéma et Télévision de Québec, a repris ses études à Montpellier pour continuer sa formation. Par ailleurs, elle est également coach d’acteurs.
C’est ainsi que les répétitions commencent il y a plus d’un an. Durant l’été 2014, les trois comédiens s’essayent au festival d’Aurillac. Dans un parc, subissant la météo, il y a toujours 40 à 50 personnes devant leur pièce. « Les conditions étaient difficiles. En extérieur, avec d’autres pièces autour, il y avait du bruit mais toujours du monde » s’enthousiasme Patie. Cette expérience leur a permis de remanier leur mise en scène. « Le spectacle était fini d’être monté quasiment quand on est allé à Aurillac, mais depuis il y a bien 60% qui a été modifié » souligne Fred. « Au début, Patie faisait une Estelle beaucoup plus nunuche. Maintenant, on voit qu’elle est superficielle mais que le vernis craque. »
Une mise en scène à deux
On ne peut que confirmer : le vernis craque. Il ne fait pas juste que s’écailler sur les bords. Il craque et il explose avec des morceaux qui volent dans tous les sens pour ces trois personnages. Les silhouettes des acteurs accompagnent à merveille ces explosions. Jeanne et sa silhouette longiligne s’insinuent dans les esprits de ses compagnons, telle une vipère. La silhouette massive de Fred qui semble solide et qui s’écroule au fur et à mesure. Patie, si dynamique, qui se fait séductrice ou s’effondre. Les rôles sont bien distribués et cela contribue indiscutablement à la sensation pour le spectateur d’assister à une réelle descente aux enfers de ces trois protagonistes.
Cette progression si maîtrisée, aux blancs positionnés aux bons endroits pour laisser le temps aux spectateurs de reprendre leur souffle, on le doit à deux metteurs en scène. « Jeanne a ramené Olivier Boutet et moi Patrick Sage, ils ont été très complémentaires » explique Patie. Olivier a une formation en lettres. Sur un texte aussi connu et reconnu, une analyse littéraire est essentielle. Là où Patrick, davantage sur le jeu, a fait travailler les comédiens sur « la dérision et l’ironie des personnages de ce drame ». On ne peut alors douter de leur complémentarité. Olivier précise que « ça s’est très bien passé » même s’ils ne se connaissaient pas.
Dans cette situation, Patie reconnaît s’être effacée : « Je me suis mise complètement de côté, je n’étais pas coach mais comédienne et j’ai suivi les directives des metteurs en scène. » Elle témoigne d’une grande confiance dans les metteurs en scène. D’une façon générale, cette troupe se fait mutuellement confiance et envisage d’aller loin en programmant son spectacle pour la saison à venir.
Infos pratiques
Vendredi 6 et samedi 7 mars à 20h
Maison pour Tous Georges Brassens, Place Jacques Brel
Tarifs : 8€ / 6€
Réservations au 04 67 40 40 11 ou au 06 51 02 28 96
(Crédit photo de Une : © Audrey Villate)