Muriel Ressiguier : « Les gens en place ne sont pas ancrés dans le réel »
Le feuilleton autour du candidat du Parti socialiste à peine terminé, c’est au tour du Front de Gauche d’être sur le devant de la scène pour déterminer la composition des listes municipales. Une épreuve significative qui laisse planer le doute quant à la solidité de cette formation.
À Montpellier, Muriel Ressiguier, porte-parole du Parti de gauche, revient sur les « divergences d’opinion » et nous expose le fil de l’action du Front de gauche.
Le Nouveau Montpellier : Bonjour Muriel Ressiguier, pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
Muriel Ressiguier : Bonjour, je suis Muriel Ressiguier, j’ai 35 ans. Je travaille à la direction régionale du service médical, qui fait partie de la CPAM, et je suis porte-parole du Parti de gauche.
Vous avez 35 ans, vous êtes donc l’une des rares candidates de moins 40 ans, avec Anne Brissaud pour l’Union des démocrates indépendants et le Mouvement démocrate. Votre âge vous apparaît-il comme un avantage ?
Je pense que oui, mais ce n’est pas essentiellement ça la question. C’est plutôt de s’impliquer et de mettre des gens ancrés dans le réel. Personnellement, j’ai l’impression que les gens en place – que ce soit dans le cadre municipal ou autre – ne sont pas ancrés dans le réel mais qu’ils raisonnent en terme de carrière. Au final, ce n’est pas une question d’âge. C’est important d’avoir des gens ancrés dans la vraie vie, prêts à résoudre les problèmes du quotidien.
À Montpellier, le Parti communiste français s’allie depuis 36 ans avec le Parti socialiste. Cela semble être un point de non retour des discussions au sein du Front de gauche puisque le Parti de gauche veut s’inscrire en rupture avec ce qu’il appelle le « Parti solférinien ». Qu’en est-il aujourd’hui ?
Ce sont des divergences d’opinions plus que des querelles au niveau national. Après, Jean-Luc Mélenchon et Pierre Laurent ont des personnalités, des caractères bien ancrés. Je pense qu’il s’agit plus de divergences d’opinions sur ce que l’on fait et là où l’on est le plus utile. Nous, au Parti de gauche, on pense que l’on est plus utiles en faisant des listes autonomes et en montrant bien la différence avec le Parti socialiste. Ce n’est pas forcément l’opinion du Parti communiste au niveau national. Au niveau national, les élus n’ont pour l’instant pas décidé ce qu’ils feraient. Ils se dirigent vers une liste avec le Parti socialiste (les déclarations du conseiller municipal communiste Michel Passet confirment cette idée). Ce n’est pas le cas de la section locale qui a réaffirmé plusieurs fois qu’elle partait sur une liste Front de gauche. On travaille avec eux et ça se passe très, très bien. *

Mélenchon et Laurent, un projet avorté ? (@GuillaumeTC ©)
Roger Moncharmont (délégué de la section locale du Parti communiste français) s’est beaucoup avancé sur le fait que vous travailliez d’abord sur un programme et que mettre quelqu’un en tête de liste n’était pas encore à l’ordre du jour.
On verra mais on est de toute façon d’accord sur le fond des idées. Pour l’instant, je suis comme les autres, si ce n’est que je suis la candidate qui a été choisie par le Parti de gauche sur Montpellier. Mais on n’a pas encore choisi le candidat en interne. Le Parti communiste français va choisir d’ici la fin de l’année et pour la Gauche anticapitaliste c’est Francis Viguié. On travaille sur le programme et on verra au moment venu la personne la mieux à même de rassembler.
Parlez-nous de ce programme axé sur sept problèmes de la ville, d’après ce qu’on a pu lire.
Il n’est pas encore fait, il a été élaboré dans des ateliers ouverts à tout le monde et lancés par le Front de gauche il y a plusieurs mois. Il n’a pas été fait pour être exhaustif. Moi, je ne le considère pas comme un programme, je le considère comme des pistes. Il y a le programme de « l’Humain d’abord » en filigrane. On évoque les services publics – dont le service à la petite enfance – et la mobilité, dans le but de baisser le coût des transports. Après, on a des liens avec des associations. C’est important pour nous de partir des gens parce que c’est important de recueillir leurs avis dans certains domaines. Plutôt que de penser à leur place, c’est bien d’aller les voir.
C’est d’ailleurs toute la difficulté de la démarche du Front de gauche et son ambition. Ce n’est pas de dire aux gens « on vous connait, on sait quels sont vos problèmes, on va trouver les solutions ». Je pourrais le faire, j’ai 35 ans, je travaille, je sais donc ce qui est bien pour vous. Ce n’est pas du tout cette démarche là au Front de gauche. C’est ce qui m’a conduite à porter cette parole. Notre discours porte sur l’implication des gens, même celle des personnes qui ont l’habitude de baisser la tête, de se laisser écraser car elles n’ont pas d’argent. Nous, ça nous tient à cœur de leur dire « réfléchissez, laissez monter vos idées avec des mots, vous n’êtes pas plus bêtes que les autres. Reprenez votre place. Redevenez acteurs de votre ville. »
Vous parliez des services publics, il y a eu une affaire cet été par rapport à la gestion de l’eau…
(rires)
Vous pourriez nous expliquer ce qu’il s’est passé et ce qui a conduit Francis Viguié et des membres du GA à faire un recours auprès du tribunal administratif ?
Il y a eu un recours notamment par l’association Eau secours. Il y a eu un recours pour tenter de revenir sur cette décision ; à mon avis, ça se jouera surtout au niveau des élections. Mais le recours permet de faire entendre la voix et de rouvrir le débat donc c’est toujours bon. Personnellement, j’ai été choquée de ce qui s’est passé le 25 juillet. Déjà une première fois, le conseil s’était réuni sur cette question. On n’était pas nombreux, ils se sont contentés de baisser la grille, au revoir et à bientôt. Là, on était plus nombreux, il y avait la presse, on est arrivés bien en avance, à 16h, la séance était vers 17h30. Et on nous a dit « c’est complet ». Il y avait les vigiles pour nous accueillir, la presse n’a pas pu rentrer, sauf la presse officielle. On nous a dit que les places étaient prises. Plus tard on a appris que c’était en fait des employés de l’agglo à qui on avait demandé d’occuper le terrain. Et là, vraiment, je me suis demandé ce qu’on dirait si c’était dans un autre pays. On est en France, dans une municipalité soi-disant socialiste, et on écrase et traite les gens comme ça. Il y avait des élus parmi nous. C’est ça une démocratie ? Ils ont peur de quoi ? Ils ont peur du débat ?
Il s’agit bien de séances publiques au départ ?
Oui, ces séances publiques sont bien publiques (rires). Il y avait un panel de vingt personnes et je me suis dit « c’est ça la démocratie participative ? »
Cette assemblée a choisi de reconduire le contrat de délégation de service public auprès de l’entreprise Veolia ?
Oui, on a appris récemment que c’était bien Veolia. Mais bon, on est en droit de se dire que les dés étaient déjà pipés. On traite les gens comme s’ils étaient des décérébrés, comme s’ils n’avaient pas leur mot à dire. C’est carrément la négation des aspirations des gens. On ne leur demande pas leur avis. S’ils ne sont pas d’accord, on leur dit qu’ils n’ont rien compris et on fait quand même. Il faut donc que ça s’arrête !
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* Recontactée plus récemment, Muriel Ressiguier a réaffirmé l’existence d’une liste autonome pour les municipales dont la composition définitive n’est à ce jour pas établie.
(Crédit photo de Une : © Midi Libre)