L’exposition photographique « I AM A MAN », la mémoire d’une lutte

I AM A MAN: Un air de gospel interprété par Marion Williams devant James Meredith, Phillipe Saurel et Gilles mora. © Alexia Point
Le Pavillon Populaire de Montpellier accueille en son sein l’exposition photographique « I AM A MAN », du 17 octobre 2018 au 6 janvier 2019.Cette 3e exposition vient mettre fin à la saison 2018, placée sous la thématique « Histoire et photographies ». Elle regroupe des photographies amatrices et professionnelles et documente sur l’évolution du Mouvement des droits civiques au Sud des Etats-Unis dans les années 60.
I AM A MAN : un regard inédit sur le passé
Placée sous le commissariat de William Ferris, spécialiste de la culture sud-américaine et sous la direction artistique de Gilles Mora, « I am a man », se veut être l’occasion pour tout un chacun de se souvenir. Elle porte un regard nouveau sur ce mouvement antiségrégationniste qui a lutté pour faire valoir ses droits dans une Amérique globalement favorable à la ségrégation.
Inédite, elle regroupe des photographies réalisées par des professionnels, mais aussi par des amateurs, qui vont mettre en lumière ces héros du quotidien, qui se sont appropriés cette lutte. Que ce soient des noirs s’asseyant à un comptoir réservé aux blancs, des noirs brandissant des pancartes en signe de protestation, ou le port d’un écriteau de protestation, ces petits gestes peuvent sembler anodins aujourd’hui, mais pour une Amérique de l’époque, ils portaient une signification particulière : la remise en cause d’un système qui les privait d’une liberté et qui reniait leur humanité.
Plongé dans une Amérique des années 60 par une scénographie travaillée, le Pavillon Populaire semble avoir tout mis en œuvre pour recréer le parcours de ce mouvement contestataire, de manière intelligible, immersif et complète. Du contexte, aux étapes clés de la lutte, en passant par les violences policières et par les oppositions à ce mouvement, William Ferris, a voulu établir une documentation fidèle aux faits historiques et interroger le rapport de la photographie et de l’Histoire.
Après les 40 000 visiteurs qu’a réunis la 1ère exposition, Aurès. 1935. Photographies de Thérèse Rivière et Germaine Tillon et les 70 000 visiteurs pour celle d’Hoffman, le Pavillon Populaire n’en attend pas moins, sinon plus, de cette ultime exposition de cette saison 2018. Totalement exclusive, après la ville de Montpellier, cette exposition va prendre place au musée de Washington et au musée de l’Apartheid de Johannesburg.

Des noirs pris en photos en train d’attendre au comptoir réservés aux blancs. Université des archives du Kentucky. © Alexia Point
I AM A MAN : la rencontre entre le passé et le présent
Les photographies permettent une rencontre entre le passé et le présent. Ces scènes historiques immortalisées par ces photos, ont transcendé le temps et composent aujourd’hui notre passé. Le mardi 16 octobre, cette rencontre s’est cristallisée lors du vernissage de l’exposition au Pavillon Populaire. Débutant par un air de gospel, puissant et émouvant, interprété par Marion Williams, cette conférence a eu l’honneur d’accueillir une icône phare de cette lutte : James Meredith.
Sous la médiation de Gérard Milési, on apprend notamment qu’en 1962, il a été le premier étudiant afro-américain à avoir été admis dans une université publique du Mississipi : l’Université d’Oxford. Même si les lois n’interdisaient pas l’entrée des noirs dans cette université, dans les faits il en était tout autre. Grâce à une procédure longue de plusieurs mois, il va pouvoir obtenir le droit de s’inscrire à cette université, pour la rentrée universitaire de 62-63. C’est alors, que l’université devient le lieu de combat entre les manifestants blancs réfractaires à l’entrée de James Meredith et un groupe de contre-manifestants. Une poupée à son effigie a été pendue aux fenêtres de l’université, pendant plusieurs mois. Cette période de grande violence, a fait des centaines de blessés et de 2 morts. Des militaires ont été déployés durant les années d’études de James Meredith pour éviter les débordements.
Malgré toutes ces violences, ce dernier a continué à lutter pour cette cause, notamment en 1966 en mettant en place la « March against fear », une marche pacifique, allant de Memphis à Jackson en signe de protestation.
À l’occasion de l’anniversaire des 50 ans de la mort de Martin Luther King, cette icône du passé a rappelé lors de ce vernissage qu’il est important de se souvenir car ces problématiques sont encore d’actualités et qu’une « une telle exposition où autant de photographies ont été rassemblées, n’aurait pu se faire en Amérique »
Philippe Saurel, le maire de Montpellier a également rebondi sur ce point en exprimant une certaine fierté de mettre en place dans les locaux du Pavillon Populaire, en plein centre-ville de Montpellier, l’exposition I AM A MAN, unique et chargée d’histoire. « Si cette exposition est reprise par Johannesburg et Washington, alors que l’Afrique du sud et les États-Unis, n’ont rien fait pour célébrer ces 50 ans, on peut considérer qu’on a une petite place à jouer dans le monde. »
Manifestants repoussés par des jets d’eau de la police photographe : Charles Moore. © Alexia Point