France Jamet : « M. Ayrault a acheté une paix électorale à Montpellier »
Le Nouveau Montpellier continue sa tournée des candidats à la mairie de Montpellier en 2014. Cette fois-ci, c’est au tour de France Jamet, candidate du Front national, de répondre à nos questions. Le rendez-vous est pris à sa permanence depuis laquelle la vue sur sur la nouvelle mairie est dégagée.
Le Nouveau Montpellier : Bonjour, nous sommes ici pour Le Nouveau Montpellier, si vous pouviez vous présentez pour les lecteurs qui ne vous connaissent pas encore.
France Jamet : Je suis France Jamet, je me présente aux élections municipales 2014 de Montpellier. Je suis au Front national depuis 1974. J’ai été investie aux dernières élections, qui font suite à une succession de candidatures que j’ai présentées aux régionales, à d’autres législatives et à d’autres municipales, mais pas forcément en tête de liste.
Vous êtes la fille d’Alain Jamet, le candidat historique du FN à Montpellier. Qu’est-ce qui vous a décidé à prendre la relève alors que vous étiez pressentie au printemps dernier candidate Front national à Sète ?
Diverses raisons. Il y a deux questions, la première concerne la relève. Mais dites, ça fait longtemps quand même. Je n’ai pas pris la relève, je suis tombée dedans un peu comme Marine (NDLR Marine Le Pen), quand j’étais petite, et j’ai continué de faire de la politique. C’est vrai que je suis partie un temps sur Sète, ville pour laquelle j’ai d’ailleurs beaucoup d’inclination, en tout cas d’affection. C’est vraiment une ville qui me plaisait beaucoup mais, au regard de la situation de Montpellier, de l’envergure et de l’aspect symbolique de cette ville, il nous est apparu – c’est un travail collectif – qu’il était utile de ne pas négliger Montpellier. Et qu’effectivement une figure historique pourrait peut-être dignement représenter ou en tout cas montrer tout l’intérêt que le Front national portait à cette ville. Aux dernières élections municipales, on a fait 5,5%, ce qui prouve bien que je ne cours pas après la facilité, je n’enfonce pas des portes ouvertes non plus. Il fallait du dynamisme, une certaine volonté pour s’attaquer à ce bastion qui jusqu’à présent était imprenable. Jusqu’à présent, il y avait Georges Frêche. Maintenant, tout est possible, à gauche, à droite. Que reste t-il de la gauche, que reste t-il de la droite ? Les saurelistes, les delafossiens, les mouristes, les mandrouistes… Enfin bon, il y a un héritage que tout le monde s’est disputé et qui a fait beaucoup d’aigris et beaucoup d’ingrats.

Dessin de Juliette Hurault pour Le Nouveau Montpellier
« Il y a un héritage que tout le monde s’est disputé et qui a fait beaucoup d’aigris et beaucoup d’ingrats ».
Quels sont les grands axes de votre programme pour notre ville ?
Ils ont été établis dans une charte que nous avons pris la peine de faire. Nous avons établi notre volonté d’élargir notre électorat et notre assise. (Le document nous est apporté) Il repose sur des fondamentaux : l’augmentation de la fiscalité et son corollaire, les mauvaises dépenses, la sécurité, la laïcité. Vous avez toute la liste sur des lignes qui peuvent se décliner à l’envie. Quand je vous parle de sécurité, c’est une politique transversale avec la question des effectifs. Mais vous n’êtes pas sans savoir que le maire de Montpellier sera vraisemblablement le président de l’agglomération, sinon chef de la métropole. Principe sur lequel nous sommes parfaitement opposés, mais qui fait que l’on pourra appréhender la problématique de la sécurité dans les transports au centre ville et surtout les moyens.
Que pensez vous des alliances PS/EELV et UDI/UMP annoncées pour les prochaines municipales ?
Ce serait dommage que l’on s’étende dessus mais je ne vais pas écarter la question. C’est un petit peu à l’image de ce que j’ai dénoncé à l’égard de Mme Mandroux. C’est à dire que M. Ayrault, avec l’argent du contribuable, a acheté une paix électorale pour permettre à M. Moure de se présenter en toute sérénité. Il a acheté le silence et la neutralité de cette dernière avec l’argent des Montpelliérains pour permettre de faire place nette. De la même façon, ces alliances ou ces mésalliances se font sur une charte beaucoup plus discutable que celle que je vous présente, elle me paraît incongrue et dangereuse. Tout d’abord parce qu’elle est insincère, ensuite parce qu’on est en train d’essayer de placer des gros machins qui vont, selon moi, et c’est ce que je dénonçais, tronquer ou truquer totalement le scrutin. Le fait que Mme Mandroux ne se représente pas va forcément entraîner une évidence. On ne va plus en parler et ne pas en parler, cela veut dire ne peut pas faire de bilan. On ne parlera plus de choses qui fâchent, c’est-à-dire le bilan de la mairie, dirigée par les socialistes pendant quelques décennies. Donc pas de bilan et pas de programme. À partir du moment où vous mettez en place deux grosses machines, enfin le terme est peut être exagéré pour l’UMP/UDI, tout cela ne repose sur rien, si ce n’est l’appropriation du pouvoir. Mais en aucun cas sur la base d’un programme ou d’un projet concordant sur lequel on devrait discuter en premier. C’est au premier tour qu’on parle des programmes, des visions que les uns et les autres peuvent avoir. Et ce n’est qu’à l’issue du premier tour que l’on devrait parler des alliances, trouver des accords globaux. Mais aborder ce sujet dès le début, je crois que tout cela va se faire au détriment de la démocratie.
« M. Ayrault avec l’argent du contribuable a acheté une paix électorale pour permettre à M. Moure de se présenter en toute sérénité ».

France Jamet (Crédit photo : © Dounia Soussane)
Vous ne pensez pas qu’une alliance avec l’UMP augmenterait vos chances électorales ?
Le Front national c’est « Montpellier fait front », soutenu par le Rassemblement Bleu Marine, qui reposera sur la charte d’actions dont je vous parlais au départ et qui est importante pour nous. Ceux qui veulent nous rejoindre sur les points essentiels sont les bienvenus. L’augmentation de la fiscalité, je ne suis pas sûre que nous soyons d’accord avec l’UMP. Ils sont d’accords pour le dénoncer, maintenant, mais pas quand ils sont à la tête de villes, de départements ou que sais-je encore. La sécurité, que je sache, on n’a pas vu l’UMP avoir une politique sécuritaire autre que celle qui fait écho à celle de M. Valls. M. Sarkozy n’a pas été un grand ministre de l’Intérieur : en cinq ans, entre 12 000 et 15 000 postes de gendarmes et policiers ont été supprimés. Il a fait beaucoup de déclarations, il s’est beaucoup agité, mais il n’y a pas un iota de différence entre l’UMP et le PS. Si je parle de ça, c’est que la charte d’actions municipales est un rassemblement ouvert à la société civile et à toute personne d’accord avec les points essentiels. Mais, déjà sur les points essentiels, nous sommes totalement en désaccord avec l’UMP. Je ne dis pas qu’il n’y a pas d’alliance possible, je suis ouverte à tout ; si quelqu’un est d’accord sur la charte, qu’il nous rejoigne. Ce n’est pas moi qui suis dans une position de demandeur, l’UMP n’a rien à exiger de nous. Je suis dans une dynamique ascendante, ils sont dans une spirale infernale. Jusqu’à maintenant, nous sommes dans une position de force, je ne vois pas ce qu’on aurait à quémander ou à demander.
« Je suis dans une dynamique ascendante, ils sont dans une spirale infernale ».
Pensez-vous que la marée Bleu Marine, attendue par le Front national, aura lieu à Montpellier, ville à gauche depuis 36 ans ?
Pardon, vous voulez dire la vague ? La marée va et revient, elle. Il y a un sacré challenge mais je suis prête à le relever, comme beaucoup d’autres villes de France. Nous pouvons et allons surfer sur une vague. J’ai toutes mes chances. Si on veut parler de politique politicienne, 5% c’est pas le FN à Montpellier. C’est clair. Si on est de 15% à 18%, comme certains osent à peine penser, ou à 20-25%, comme je pense que l’on peut faire avec une bonne campagne. Campagne qui va aussi s’inscrire dans celle des européennes. Il faut savoir aussi que le machin UMP/UDI et PS/EELV et le Rassemblement Bleu Marine, avec « Montpellier fait front », ont toutes les chances, les uns et les autres, de se retrouver dans le même étiage entre 20 et 25%. Cela tient à peu de choses. Je pense que j’ai autant de chance que M. Domergue et peut être même autant que M. Moure, quoi qu’il en pense.
« Je pense que j’ai autant de chance que M. Domergue et peut être même autant que M. Moure, quoiqu’il en pense ».
Pour revenir sur un cadre plus national, ces derniers temps, plusieurs élus du FN sont partis en claquant la porte. Comment expliquez-vous cela ?
Mais vous avez fait un lapsus, ce ne sont pas des élus, ce sont des gens qui aspiraient à être élus et qui, quelques fois, n’étant pas sûrs de l’être, ont eu des états d’âme. Cela fait partie du processus d’ouverture, on reçoit des personnes qui se comportent plus ou moins bien. Mme Roig, je crois, avait des velléités et apparemment le FN n’a pas répondu à la hauteur de ses espérances. Ce sont des gens qui ont voulu être candidats mais il y a eu des divergences, cela arrive.
Mais, plus que des états d’âme, ils ont déclaré avoir été témoins de véritables décalages entre le discours de Marine Le Pen et la réalité du parti.
Je ne me tiens pas à tous les faits mais il y en a un ou deux, déjà, qui ont reconnu qu’ils n’avaient pas entendu ou qu’ils n’étaient pas questions d’eux. C’est discutable. Il y a des gens qui viennent de toute sensibilité, on est dans un mouvement d’ouverture avec évidemment, comme dans tous groupe, des accrocs, des explications, des colères. Je pense qu’en général ça vient plus souvent de discours qui peuvent paraître excessifs et que j’ai parfaitement condamnés, mais qui ne viennent pas forcément des gens de pur jus Front national. Je suis en phase totale avec le discours, je crois être une historique aussi, et je suis parfaitement à l’aise avec les fondamentaux et les points essentiels que nous défendons.
Mais justement, ces points essentiels ont quand même changé entre les discours de Jean-Marie Le Pen – qui disait être le Ronald Reagan français, avec un état limité aux fonctions régaliennes et une politique économique ultra libérale – et le discours que tient actuellement Marine Le Pen ?
Je ne crois pas et, voyez-vous, puisque nous avons des destins parallèles, nous avons évolué de la même façon. Sans, bien sûr, nous concerter, nous n’en avons pas eu le temps. C’est la France qui a changé, ce sont les Français et les Françaises qui ont changé, donc une politique se doit de ne pas être rigide mais d’évoluer. Moi, j’ai toujours la sensation d’avoir toujours grandi dans le cadre d’un mouvement qui se revendiquait populaire et cette idée de peuple a toujours été le moteur de l’action politique que je voyais papa (NDLR Alain Jamet) mener et que je voulais mener aussi. Et, dans la situation actuelle, on devait changer. Je veux dire Reagan, c’était les Trente glorieuses tout allait bien. Dans son temps c’est le Front national qui, le premier, a dénoncé les agissements du grand patronat qui, en organisant une immigration débridée, a contribué au dumping social – et continue encore à le faire. Aujourd’hui, il y a le problème du chômage. On est en train de préparer des demains qui déchantent donc il faut prendre les mesures qui s’imposent. Le protectionnisme raisonné, une sortie de l’euro concertée, la prise en compte d’un état stratège, un état qui est là pour protéger.
(Crédit photo de Une : © Le JDD)