Kélian Galletier : “On peut encore prétendre à nos ambitions”
Auteur d’une saison remarquable, le troisième ligne du MHR Kélian Galletier a répondu aux questions du Nouveau Montpellier. À la veille du match retour de H-Cup contre Trévise – auquel il ne participera pas à cause d’une blessure – le jeune joueur s’est confié, sans retenue. Son début de carrière, la saison difficile du MHR, son avenir : confidences de cette future pépite du rugby montpelliérain.
Le Nouveau Montpellier : Bonjour Kélian, peux-tu te présenter pour le public qui ne te connait pas encore ?
Kélian Galletier : Je m’appelle Kélian Galletier, je suis né le 18 mars 1992. Je mesure 1,88m, je pèse 98 kg. Troisième ligne, je joue aux postes 6,7 et 8.
Peux-tu nous parler de ta carrière et de tes titres ?
J’ai gagné un titre de champion de France en -17 ans cadet, un titre de champion de France en -19 et avec les Espoirs l’an dernier. Les trois avec Montpellier.
Étaient-ce des titres prévisibles avec chacune des trois équipes ?
Avec les moins de 17, c’était une belle équipe avec une saison remarquable, on visait le titre, on s’y préparait. Lorsque j’étais en moins de 19, j’ai participé aux phases finales puisque j’étais déjà dans le groupe Espoirs puis je me suis blessé par la suite. Quant au titre Espoirs, l’an passé, c’était un peu moins attendu, on avait une belle équipe et comme ambition de bien figurer, mais des concurrents solides. La demi-finale compliquée, on a pu la remporter malgré tout ; la finale, haut la main avec plus de 40 points contre Agen. On finit champions, c’était une belle saison.
À cette époque, tu comptais déjà plusieurs participations à des matches professionnels, était-ce un tremplin non négligeable dans ton parcours avec les Espoirs ?
Oui bien sûr, quand on évolue en pro on sent la différence, il y a un écart assez important. Il faut savoir qu’un tiers des espoirs sortent professionnels, il y a donc un décalage. Participer à un match professionnel équivaut à trois ou quatre matches d’espoirs.

(Crédit photo : © MHR)
Seulement un tiers des jeunes atteignent le groupe professionnel, comment juges-tu ton niveau par rapport aux autres qui n’ont pas eu l’opportunité de poursuivre avec le MHR ?
Le haut niveau demande beaucoup d’engagement et de persévérance, il faut savoir s’entraîner dur et identifier ses points faibles. Être capable de prendre ses meilleurs points forts et améliorer ses points faibles pour s’imposer, pour être au meilleur niveau possible. Lorsque l’on est jeune et que l’on atteint le niveau professionnel, on s’intègre à des joueurs plus âgés, matures, qui ont essentiellement déjà fait leurs preuves, contrairement à nous. En tant qu’Espoirs, c’est à nous de prouver que l’on a le potentiel pour prétendre à une carrière.
Tu es à un poste de troisième ligne qui requiert beaucoup de qualités, aussi bien en attaque qu’en défense. Un poste plébiscité, quand on connait la concurrence notamment avec « Fufu » Ouedraogo. Comment t’es-tu préparé à ce challenge à ton arrivée cette saison ?
Cela fait déjà trois ans que je suis avec le groupe professionnel, cela fait deux ans que je persévère à jouer avec les pros et à ne pas jouer énormément, c’est la première année que j’ai autant de temps de jeu. Il a fallu ces deux années pour me mettre au niveau. Une fois dans la rotation, la concurrence m’a propulsée et fait qu’on essaie de se surpasser. En troisième ligne, en France, il est vrai que l’on a un bon vivier. Dans les clubs, il y a toujours une forte concurrence, notamment à Montpellier où il y a Ouedraogo mais aussi Gorgodze, Beattie, Bias et j’en passe encore.
Y a-t-il un joueur qui t’inspire particulièrement ?
Je me suis toujours inspiré de tous ces joueurs. Ils ont tous des qualités physiques atypiques et énormes. Mamuka est assez puissant. Alex Toulu, l’amalgame des deux, Alex Bias est un plaqueur hors norme et Johnnie Beattie est très technique. Le fait d’être à côté d’eux me permet de voir comment ils travaillent et de prendre un peu à chacun pour être le meilleur possible. Ce principe de s’inspirer de grands sportifs est important.
Cette saison tu as explosé, 18 matches joués dont 12 titulaires, comment expliques-tu cela ?
Il y a toujours une part de chance dans le sport de haut niveau, c’est vrai que j’ai profité de quelques blessures, notamment de Mamuka, mais je suis aussi arrivé en pleine forme, en pleine bourre, j’ai profité de ça. Je suis un joueur qui a des qualités, vitesse, endurance, je suis capable de répéter un bon nombre d’efforts durant un match. Cela m’a souri et me permet d’être plus en confiance pour enchaîner les matches. La preuve en est : la remise en question est permanente, je suis blessé actuellement mais comme tout grand champion il faut savoir rebondir.
As-tu, selon toi, d’ores et déjà fait tes preuves et peux-tu prétendre, dès à présent, à d’autres objectifs ? Ou est-ce que c’était une part de chance et qu’il te faut néanmoins continuer à prouver que tu es capable de faire partie du groupe ?
Je pense que c’est un peu des deux. Il va falloir continuer à prouver parce que cela ne fait que six mois que je joue vraiment. En revanche, j’ai aussi montré que j’avais des atouts à faire valoir et ce, sur n’importe quel match. Rien n’est ancré pour moi, rien n’est fait. Je pense que j’ai prouvé que je peux jouer au haut niveau.

(Crédit photo : © MHR)
« Je pense que j’ai prouvé que je peux jouer au haut niveau ».
As-tu obtenu la confiance du coach ?
Oui, ils me font confiance ; quand ils réfléchissent à la feuille de match, ils pensent à mon nom. Le fait que je sois blessé est peut-être un problème pour eux, tout comme pour moi. Ils me font confiance malgré les progrès que j’ai à faire.
Comment vis-tu l’ère Fabien Galthié ? Satisfait ?
Cela fait trois ans que je suis avec. Je constate qu’il a apporté sa qualité technique au club. La force de ce club était d’avoir une équipe très soudée, capable de renverser des montagnes, tutoyer le haut niveau. Un seul entraîneur ne peut pas tout faire, il faut savoir que gérer une équipe est très compliqué, le management est très important. Pour nous, les joueurs, il est important de savoir que pour atteindre nos objectifs – certes ambitieux cette année, mais qui le sont pour toute équipe qui se respecte – il faut s’en donner les moyens. Ce sont nous les maîtres de notre destin.
Pour te donner le maximum de chances d’évoluer, mais aussi naturellement, tu joues 6,7 et 8. As-tu une préférence ?
Non je prends la polyvalence. Les trois postes ont des caractéristiques plus ou moins liées à leur positionnement. Je pense être capable de jouer les trois et je compte sur ça toute ma carrière.
Le MHR a connu quelques difficultés avec, en moyenne, une victoire/une défaite. Comment envisages-tu la suite de la saison ?
On prend les matches les uns après les autres. On a perdu des points. Une chose est sûre, la H-Cup est terminée, en championnat c’est très serré. On a tout de même perdu des points importants. Notre fin de championnat avec Castres, Grenoble et le Racing Metro est très importante. Ce sont nos trois rivaux pour la qualification en phase finale et en H-Cup. Il faudra être en place.
Quelle est l’ambition du groupe pour cette saison, malgré vos prestations moyennes ?
On vise toujours de se qualifier pour les phases finales. Il nous reste à se focaliser sur cet objectif à la vue de notre position en poule. C’est peut-être un mal pour un bien, ça nous permettra de mieux nous préparer. On va avoir des périodes pendant lesquelles on aura moins de matches à jouer que certaines équipes. Ajouté à ça le temps de récupération, cela pourra compter pour notre fin de saison. Je suis convaincu qu’on a les moyens de se qualifier.
Dans tes interviews, tu as souvent fait allusion au manque de cohésion, qui est pour toi la cause principale cette saison. N’y a-t-il vraiment que cela ?
Je pense que c’est une grande partie de notre mal aujourd’hui. Dans notre sport, dans un sport collectif en général, la cohésion influe beaucoup sur le jeu et les performances. Il faut qu’on arrive à retrouver cette cohésion qui avait fait la force de l’équipe en 2011 et qui les avait emmenés en finale. C’est compliqué chaque année de perdre des éléments et d’en voir arriver de nouveaux, mais c’est une part du monde professionnel du rugby, c’est à nous d’essayer de nous entendre sur le terrain et à se sacrifier les uns pour les autres. J’espère que c’est dans les esprits de tous et qu’on y arrivera à la fin de l’année.
« C’est à nous de se sacrifier les uns pour les autres ».
L’année a été marquée par la prolongation de trois cadres (François Trinh-Duc, Fulgence Ouedraogo, Thibaut Privat) et l’arrivée de nouvelles recrues, comment s’est passée leur intégration au sein du groupe ?
Bien bien, arrivés en forme. Ils sont motivés pour réaliser des choses avec cette équipe. Comme pour tout joueur, il y a un temps d’adaptation. Plus vite ils s’acclimateront, mieux ce sera pour nous. Il y a des joueurs, comme Robert Ebherson, qui n’ont pas eu beaucoup de temps de jeu donc qui n’ont pas pu beaucoup s’exprimer, en espérant cependant qu’il pourra le faire un peu plus cette saison.

(Crédit photo : © MHR)
Malgré vos atouts, il reste un bémol ?
On a besoin de rodage, je prends l’exemple de Clermont, une équipe qui possède depuis quelques années des joueurs cadres. Ils ont un noyau très fort et je pense que sur les dernières finales jouées c’est un atout sur lequel il faut prendre exemple pour pouvoir construire quelque chose. Gagner un titre de champion, c’est pas que soulever le bouclier, c’est vivre une aventure commune pour pouvoir réaliser cet exploit. On a besoin d’être des amis avant d’être des collègues de travail.
« On a besoin d’être des amis avant d’être des collègues de travail ».
C’est une qualité que vous avez du mal à trouver ?
Cela prend du temps, ça ne vient pas comme ça, c’est un point très important du sport collectif. Lorsque je joue avec des personnes que je connais, des personnes que j’aime, je joue mieux. Des personnes avec qui j’ai l’habitude. À part Fufu Ouadraougo, François Trinh-Duc et Benoît Paillaugue, il n’y a pas beaucoup de joueurs actuels qui étaient présents lors de la finale.
Comment as-tu vécu le départ de Julien Thomas ?
C’était un joueur très important au club. Il est parti, cela fait nécessairement un vide, mais on a récupéré Jonathan Pélissié, excellent sur le terrain, et je pense que l’aventure peut être aussi belle avec lui.
Vous restez sur deux matches et deux défaites, à quoi cela est-il dû selon toi ?
On est allés à Brive avec des ambitions et nous ne sommes pas passés loin. Les conditions n’étaient pas faciles, ce qui a avantagé Brive qui possède un jeu basé sur ses avants. On a fait bonne impression, on était en course pour gagner le match mais on a fait un peu trop de fautes. On s’est lâchés sur la fin du match, ce qu’on n’a pas fait avant car le sens tactique du match ne nous le permettait pas. On n’a pas passé la ligne, c’est dommage. Cependant, on a quand même ramené un point défensif.
En ce qui concerne le match de Ulster, l’ambition était de se mesurer face au futur champion d’Europe, ce qu’on a fait. Avec une bonne défense, ils ont trouvé la solution que par le pied et nous on a réussi à retrouver le jeu qui était le nôtre et j’espère que demain (samedi) ce sera le cas.
Ce dont on parle souvent après vos matches, c’est de ces erreurs qui nuisent à vos performances, quel est votre ressenti ?
On a des regrets. En ce moment, ce qui nous manque, c’est un peu de confiance, on est fébriles et ce depuis quelques mois. Cette confiance viendra en s’entraidant, en étant capables de construire bout après bout des performances et réussir à ne plus hésiter, à se lâcher complètement, à avoir confiance en nous pour permettre d’évacuer ces mauvaises phases et évacuer ces erreurs qui nous coûtent un peu cher.
Quel est l’état d’esprit du groupe à la veille d’un match comme celui de Trévise qui, qu’importe le résultat, sera d’ores et déjà neutre pour la suite de la H-Cup ?
Pour être honnête, nous sommes plutôt focalisés sur Bordeaux, on prend ce match comme une préparation pour la semaine prochaine. En revanche, on ne le prend pas à la légère puisqu’il peut nous relancer sur une victoire à domicile, ce n’est pas négligeable et ça peut nous permettre de se préparer pour Bordeaux qui va être un tournant. Bordeaux une équipe très difficile à manier, très en forme, qui fait des performances à l’extérieur. S’il nous arrive le malheur de perdre, cela compromettra beaucoup nos chances de se qualifier.
« Perdre contre Bordeaux, compromettra beaucoup nos chances de se qualifier ».
Qu’est-ce que cela te procure à la veille d’un match retour comme celui là, qui a particulièrement compté cette saison pour toi à l’aller ?
Je l’ai un peu en travers. J’avais visé Ulster, Trévise et Bordeaux. J’arrivais en forme et ne pas pouvoir les jouer me déçoit. Ulster et Trévise sont des matches sans pression, qui peuvent nous libérer pour pouvoir affronter Bordeaux avec confiance. C’est une période importante qu’on vit, j’aurais été content de la vivre mais malheureusement, comme tout sportif, la blessure fait partie du jeu. J’espère que je reviendrai plus fort par la suite.
Trévise, dernière du classement avec 0 points, aurait pu être pour toi l’occasion de te montrer ?
Ce sont des matches à jouer, mais attention aux Italiens. Pour les avoir joués quelques fois, ce sont des accrocheurs, ils ne lâchent rien. Il est évident que, sur ce genre de match, on peut briller et toucher un peu plus de ballons. C’est en effet ce genre de match que j’aime bien jouer car le jeu est un peu plus débridé, il est évident que c’est dommage de manquer ce match mais il y en aura d’autres.
Es-tu optimiste pour les mois qui arrivent ?
Oui, je suis optimiste, je pense que toute mauvaise passe a une fin. Rien n’est perdu, on peut faire de bonnes performances à l’extérieur et enchaîner sur une bonne dynamique pour nous permettre de finir pleinement cette saison. C’est ce qui compte. Les trois derniers matches sur les quarts et demi-finales sont importants, on n’est pas champions si on est pas prêts pour ces matches !
« On peut encore prétendre à nos ambitions ».
Bon nombre des supporteurs montpelliérains disent que tu es « le jeune espoir du club », « la nouvelle révélation » ou encore « un élément excellent », as-tu un mot à leur dire ?
C’est gentil de leur part. Je continuerai sur cette voie parce que, comme toute révélation, j’ai envie de rester sur cette passe parce que confirmer c’est le plus dur. Qu’ils croient en moi, ça fait très plaisir et j’espère que je pourrai continuer à prouver qu’ils auront eu raison de croire en moi.