M’Baye Niang est-il le sauveur du MHSC ?
M’Baye Niang a rejoint le Montpellier Hérault Sport Club au Mercato d’hiver. Pour beaucoup, il est l’attaquant tant attendu qui faisait défaut au club depuis le départ d’Olivier Giroud. Le Nouveau Montpellier s’est posé la question : M’Baye Niang est-il le sauveur du MHSC ?
Auxerre, 20 mai 2012. Avant cette dernière journée, le MHSC a trois points d’avance sur le Paris Saint-Germain, depuis peu propriété qatari, et a par conséquent son destin entre ses mains. Au terme d’un match particulier entre le leader et une équipe auxerroise lanterne rouge, qui sera interrompu plusieurs fois par des supporteurs bourguignons mécontents, le club héraultais devient champion de France pour la première fois de son histoire.
Qu’il semble loin ce temps, où, à peine trois saisons après sa montée en Ligue 1, le Montpellier Hérault Sport Club devenait champion de France. Une campagne de Ligue des champions manquée et une saison terminée sans panache à la 9ème place plus tard, le club montpelliérain vit une saison 2013-2014 plus que compliquée. Seulement deux matches gagnés en championnat, d’innombrables matches nuls, une élimination calamiteuse à Sochaux pour les 16e de finale de la Coupe de la Ligue… Ah, qu’elle est loin la glorieuse époque des Giroud, Utaka, Belhanda et consorts !
Un effectif qualitativement insuffisant : une flagrante inefficacité
Jean Fernandez, qui a démissionné le 5 décembre dernier, n’a pas réussi à trouver la formule, il n’a cessé de modifier son trident offensif qui a constamment manqué d’efficacité. En effet, le Montpellier Hérault est la 4e plus mauvaise attaque de Ligue 1 mais, pire, son meilleur buteur, auteur du tiers des buts héraultais, n’est autre que son meneur de jeu et occasionnellement ailier, Rémy Cabella. Convoité, ce dernier a assuré qu’il finirait la saison dans son club formateur avant de s’en aller vers d’autres horizons. Derrière, en 19 journées de Ligue 1, Victor Hugo Montano, de retour au club, n’est qu’à 4 buts, Souleymane Camara à 2, Anthony Mounier à 1 tout comme Djamel Bakar ; Emmanuel Herrera dit « El Tanque » (qui mitraille plus à côté que dans les cages) n’a même pas ouvert son compteur buts… ni celui de tirs cadrés !
Depuis le titre de champion de France, l’effectif montpelliérain a vu ses meilleurs éléments partir et les a rarement remplacés par des joueurs de même calibre. Montpellier est une équipe brouillonne, en témoigne une statistique sans appel : Montpellier n’a cadré que 32% de ses tirs depuis le début de la saison !

(Source : Squawka.com)
Avec de telles statistiques, les protégés de Loulou Nicollin ne peuvent espérer grand chose et peuvent même imaginer le pire, eux qui ne comptent que 3 points d’avance sur une zone rouge qu’ils n’ont occupée que deux fois depuis le retour parmi l’élite (3e journée de la saison 2012-2013 et 2e journée de 2013-2014).
Trois matches se sont déroulés depuis le départ de Jean Fernandez, pas une victoire de plus à mettre dans l’escarcelle orange et bleue, trois matches nuls pour un seul but inscrit durant l’intérim de Pascal Bails. Rolland Courbis n’a lui non plus pas trouvé la formule. Et ce n’est pas la blessure de longue durée de l’ex-nancéen Djamel Bakar qui va arranger les affaires. Le recrutement d’un avant-centre apparaissait donc nécessaire, il est intervenu avec le prêt de M’baye Niang, le précoce attaquant français du Milan AC.
Mais est-il judicieux de miser autant sur un jeune garçon qui est, justement, lui même un espoir du football français ?
Un sauveur nommé M’Baye ?
Ce que tout le monde attend de M’Baye Niang c’est, évidemment, qu’il joue le rôle du sauveur d’un Montpellier en totale perdition. Hormis lui-même, avec le départ d’Herrera, trois joueurs sont susceptibles d’évoluer en pointe : Victor Hugo Montano, Souleymane Camara et Djamel Bakar. Les deux derniers ont fréquemment été relégués à des positions d’ailiers, postes théoriquement moins propices au scoring. Les Montpelliérains se créent trop peu d’occasion, Victor Hugo Montano, le buteur attitré de l’équipe qui a disputé 18 des 19 premiers matches montpelliérains, dont 13 en tant que titulaire, n’a frappé que 24 fois au but en 18 matchs, pour 12 tirs cadrés. Encore une fois, et c’est un paradoxe, le plus gros artilleur héraultais est Rémy Cabella.

Dessin de Juliette Hurault pour Le Nouveau Montpellier
Cependant, l’équipe montpelliéraine, bien qu’indéniablement inefficace, a rarement été modifiée, du moins dans son dispositif. La formation la plus alignée cette saison a été un 4-2-3-1, 13 fois répété ou des dérivés de celui-ci avec des 4-3-3 tendant vers le premier système.
Nous avons tendance à oublier la jeunesse de M’Baye Niang, 19 ans tout neufs, qui avait débuté et marqué ses premiers buts sous les couleurs du Stade Malherbe de Caen à 16 ans lors de la saison 2010-2011. Tout jeune, il prenait ainsi part à 7 rencontres, dont 4 en tant que titulaire, seul à la pointe de l’attaque de l’équipe normande, et frappait déjà 3 fois : le nouveau phénomène franco-sénégalais était né ! Les échelons étaient alors rapidement gravis et, après une seconde saison moins décisive que la précédente mais perturbée par des blessures, son équipe était reléguée. À 18 ans et une vingtaine de matchs professionnels dans les jambes, le voilà alors parti à la conquête du gotha du football mondial. Après un essai à Arsenal, c’est finalement le Milan AC, coutumier du fait avec des jeunes joueurs français (ou francophones), qui l’enrôle pour 4 ans. Mais le jeune attaquant axial va connaître la difficulté de s’imposer dans un grand club. Cantonné aux seconds rôles, c’est quasi essentiellement sur une aile qu’il jouera, apprenant à évoluer dans un nouveau poste, celui d’ailier au service de joueurs plus expérimentés tels que Robinho, Bojan ou encore Mario Balotelli. Pourtant, depuis 2012 et son arrivée au Milan AC, il a plus été remplaçant que titulaire et n’a inscrit qu’un but en match officiel, en coupe d’Italie face à la Reggina, une équipe de seconde division. M’Baye Niang a donc changé de profil, d’un attaquant axial il est plutôt passé à un ailier droit, une corde supplémentaire à son arc, suffisante pour faire de lui le sauveur du Montpellier Hérault ?
Des raisons d’espérer ?
Les deux derniers joueurs français prêtés par le Milan AC à des clubs français ont à court ou moyen termes donné satisfaction et ont été engagés pour le bonheur des clubs et de leurs supporteurs. C’est le cas de Yoann Gourcuff qui a rejoint le club lombard à tout juste 18 ans, mais également de Pierre-Emerick Aubameyang, l’ancien goléador stéphanois, au même âge. Le premier avait été prêté avec option d’achat d’un peu moins de 15 millions d’euros aux Girondins de Bordeaux et avait donné entière satisfaction dès ses premiers matches pour être acheté par les dirigeants bordelais contre une indemnité de 13,6 millions d’euros. Les Milanais s’étaient alors mordus les doigts d’avoir introduit cette option d’achat : si Bordeaux était disposé à payer la dite somme, ils ne pouvaient alors refuser. Dans le second cas, Pierre-Emerick Aubameyang avait successivement été prêté à Dijon (en Ligue 2) puis à Lille et Monaco. Lors de ces deux derniers prêts, l’option d’achat n’avait pas été levée. Le quatrième club sera alors le bon, suite à un prêt aux Verts en Janvier 2011, l’opération est reconduite pour la saison 2011-2012 mais, en décembre, les Stéphanois décident de lever l’option pour un transfert qui ne coûtera pas plus de 1 million d’euros.
La jurisprudence milanaise joue donc en faveur des Montpelliérains. De plus, M’Baye Niang, mis en cause dans la virée nocturne des Espoirs (avec Yann M’Vila, Antoine Griezzman, Wissam Ben-Yedder et Chris Mavinga), s’est, à moins de 17 ans, taillé une réputation sulfureuse qui colle fréquemment aux baskets des footballeurs : celle de « petit con imbu ». Dans cette affaire, les cinq protagonistes avaient pris l’initiative de prendre un taxi depuis Le Havre, où se tenait le rassemblement, pour sortir en boite de nuit à Paris, à quelques jours d’un match de qualification décisif. Les cinq fugueurs avaient donc été sanctionnés et suspendus de sélection jusqu’au 31 décembre 2013. Entre temps, la sélection sénior sénégalaise, par l’intermédiaire d’Alain Giresse, son sélectionneur, avait fait les yeux doux au jeune joueur, avances refusées par l’intéressé qui entendait jouer pour la France. Il tente depuis ce triste épisode de se forger une meilleure réputation ; mais M’Baye Niang est un peu dans la situation vécue par le personnage principal dans la chanson Mauvaise Réputation de Georges Brassens, qui chantait : « Au village, sans prétention, j’ai mauvaise réputation ; Que je me démène ou que je reste coi, je pass’ pour un je-ne-sais-quoi ». En l’occurrence, la mauvaise réputation apparaît justifiée, et ses frasques n’ont fait qu’illustrer un préjugé plutôt défavorable dans l’imaginaire français. Mais cette « pige » à Montpellier, où il est attendu comme un sauveur, pourrait être une rédemption pour le jeune attaquant qui est à nouveau sélectionnable en équipe nationale. Depuis l’épisode, Wissam Ben-Yedder n’est plus que l’ombre de lui même à Toulouse, Yann M’Vila et Chris Mavinga, les amis rennais, sont exilés en Russie au Rubin Kazan ; seul Antoine Griezmann, parti en Espagne à la Real Sociedad, brille et est fortement pressenti pour rejoindre la liste pour le prochain mondial cet été au Brésil. M’Baye Niang a fait profil bas, il a travaillé avec humilité de son côté, a su répondre présent lorsque Massimo Allegri l’entraîneur du Milan AC comptait sur lui.
De plus, lors de ses quelques sélections en Équipe de France Espoirs, il a eu l’occasion de côtoyer Benjamin Stambouli ou Rémy Cabella, ses nouveaux partenaires de clubs. D’ailleurs, ce dernier, seul réel homme fort du club depuis ce triste début de saison, pourrait devenir le pourvoyeur attitré de la recrue montpelliéraine, mais reste à savoir à quel poste jouera M’Baye Niang…
Un scepticisme ambiant compréhensible
Montpellier a besoin d’un buteur, d’un homme qui puisse porter sur ses épaules son équipe et la sauver de situations périlleuses. La question du poste qui sera attribué à M’Baye Niang justifie les inquiétudes. En effet, bien qu’attaquant de formation, depuis qu’il appartient au Milan AC on l’a plus souvent vu déborder sur l’aile droite au service de l’attaquant à la carrure suffisante pour débloquer des situations délicates, en l’occurrence le charismatique et tout aussi caractériel Mario Balotelli. Montpellier n’a pas besoin d’un ailier de plus, Victor Hugo Montano ne satisfait guère en premier choix, Emmanuel Herrera a été prêté aux Tigres UANL, club mexicain, Djamel Bakar s’est blessé et sera indisponible jusqu’à la fin de la saison. Souleymane Camara, depuis des années, s’est reconverti avec brio à un poste d’ailier, même s’il arrive qu’il dépanne aux avant-postes. Alors, quel poste pour le nouvel arrivé ?
De plus, pour être le sauveur d’un club en totale perdition, l’expérience n’est-elle pas de mise ? En effet, M’Baye Niang, même s’il est dans le monde professionnel depuis quelques années déjà, n’a que 19 ans. Cela paraît en l’occurrence trop peu pour pouvoir porter à bout de bras une équipe en difficulté, d’autant plus que, même s’il avait commencé fort en devenant l’un des plus jeunes titulaires de l’histoire de la Ligue 1, il a depuis peu joué. Certes, il a pu apprendre en compagnie de joueurs d’expérience et au sein de structures de premier choix, mais cela est-il assez pour en faire un héros ? Est-ce suffisant pour que Niang devienne une idole pailladine ?
Des débuts encourageants
Fraîchement débarqué à Grammont et à la Mosson, M’Baye Niang a pour le moment les faveurs de Rolland Courbis. Dès son premier match, à Rodez en Coupe de France, le nouveau coach montpelliérain l’a fait entrer à son poste de prédilection en cours de match. Pour sa première apparition, il ne lui aura fallu que quelques minutes pour provoquer un pénalty et se faire justice lui-même en le transformant. Vendredi dernier, pour sa première apparition dans le groupe pour un match de championnat, il était aligné face à l’ogre monégasque. Lors de cette partie, dans laquelle il sera titularisé seul à la pointe de l’attaque, en 73 minutes, il cadrera 100% de ses frappes, se montrant mobile et plein de volonté. Certes, les automatismes restent à perfectionner ; pourtant, sur un éclair de génie de Rémy Cabella qui a littéralement enrhumé Eric Abidal et provoqué un pénalty, c’est à nouveau lui qui, en deux temps après avoir vu sa tentative détournée par Subasic, a fini le travail. Alors certes, deux pénaltys marqués en deux matches, mais pas de buts inscrits dans le cours du jeu, des prestations à améliorer et des repères à trouver, mais ces débuts sous les couleurs montpelliéraines sont plus qu’encourageants. Ces débuts sont prometteurs, mais le plus dur reste de confirmer pour ce joueur qui a oublié (et n’a jamais réellement connu en professionnel à son âge) la sensation d’empiler les buts. Il est évident que Niang ne pourra pas continuer à ce rythme d’un but par match mais, tant en se montrant décisif en marquant qu’en contribuant à débloquer des situations pour ses partenaires, il pourra engranger de la confiance et cette expérience qui pourra lui permettre de prendre ses responsabilités et de s’installer en leader. Et c’est d’un leader qu’aura besoin le Montpellier Hérault Sport Club car le club n’a plus qu’un point d’avance sur la zone rouge et sur Valenciennes ; il est possible que ce leader et sauveur soit M’Baye Niang. Prochaine étape dans le Doubs, à Sochaux, pour un match de bas de classement coupe-gorge, l’occasion pour le jeune international français de faire un peu plus ses preuves. Des preuves qui pourraient être bénéfiques aux deux parties, en gommant l’image de garçon imbu de lui-même voire de joueur surcoté et en permettant au club de prendre un nouveau souffle. Tout le monde serait gagnant…
(Crédit photo de une : © Icon Sport / MadeInFOOT.com)