L’antiracisme va-t-il nous faire marcher longtemps ?
Dimanche 5 janvier 2014, le journal en ligne Mediapart publiait une information selon laquelle le racisme serait monnaie courante à la SNCF de Montpellier. L’occasion pour Le Nouveau Montpellier de s’interroger sur cette notion et sur la place qu’elle occupe dans la société.
La commémoration de la marche pour l’égalité et contre le racisme a occupé l’actualité médiatique de la fin d’année 2013. Films, documentaires, livres, chansons de rap (#teamNekfeu), émissions de divertissement sur les chaînes de télévision : un sujet incontournable. Le Nouveau Montpellier a, à son tour, voulu revenir sur cette lutte, en se focalisant essentiellement sur la ville de Montpellier.
Pourquoi l’évoquer aujourd’hui, alors que les autres médias sont passés à autre chose ? Peut-être pour montrer le côté éphémère de cette lutte une fois qu’elle a quitté le champ télévisuel, mais aussi, et surtout, pour revenir sur l’événement tel qu’il a été vécu à Montpellier.
Le 13 novembre 2013, des discours quelque peu improvisés sont prononcés devant la statue de Jean Jaurès au centre ville de Montpellier. Philippe Thinès, adjoint à la mairie, est notamment revenu sur les insultes dont a fait l’objet la garde des sceaux, Christiane Taubira, suite à la publication du journal Minute. Un appel à la fraternité, valeur républicaine, avait également été fait devant les quelques badauds arrêtés par hasard.
À la suite de ça, les 22, 23 et 24 novembre, l’association Kaina, qui collabore avec les quartiers populaires, organise un événement en présence des « marcheurs ». Le but poursuivi étant d’« ancrer cet événement jusqu’alors méconnu qu’est la marche dans l’Histoire nationale ».« Il nous a paru évident que, pour son 30e anniversaire, nous nous devions de rendre hommage à ces hommes et femmes qui, un jour, se sont levés et ont marché pour dire stop au racisme, aux violences, aux discriminations. Ils ont marché ensemble pour réclamer leurs droits en tant que citoyens français », déclare Akli Aliouat, le directeur de Kaina. Pour l’anecdote, l’un des jeunes bénévoles de l’association a appris que son père avait également rejoint le mouvement en 1983. Ces trois jours sont l’occasion de débattre, notamment grâce à la diffusion de quelques minutes du documentaire de Mogniss Abdallah devant des élèves du collège des Escholiers de la Mosson. L’objectif ? Assurer un certain devoir de mémoire.

(Crédit photo : © Kaina
Interviewée par l’équipe de Kaina, la marcheuse Marie Laure Mahé a également évoqué le mouvement « Convergence 84 ». Ce dernier, encore plus méconnu du grand public, a inspiré le slogan « La France, c’est comme une mobylette, pour avancer, il lui faut du mélange ». Ce projet mettait en scène des jeunes issus de différentes composantes de la population immigrée – maghrébine, subsaharienne, portugaise et asiatique – réalisant cinq parcours à travers la France équipés de mobylettes avec le même mot d’ordre que la marche de 1983. Paradoxalement, l’instigatrice de ce projet, Farida Belghoul, est aujourd’hui la seule voix discordante qui s’est élevée lors de la commémoration de la marche. Dans des vidéos postées sur Youtube, elle fait état d’une manipulation ayant dénaturé le projet de la marche. Selon elle, le Parti socialiste n’aurait pas seulement fait de la récupération politique sur la Marche mais l’aurait directement commanditée. Cependant, Marie Laure Mahé, ancienne proche de Farida Belghoul, avoue avoir du mal à croire « ces allégations ».

Dessin de Juliette Hurault pour Le Nouveau Montpellier
30 ans après la marche pour l’égalité et contre le racisme, où en est-on ?
Un récent article du quotidien Le Monde, daté du 14 décembre 2013, fait état « d’une France tolérante mais crispée sur l’Islam ». Selon cet article, si l’on peut noter une baisse dans l’opinion du racisme, le rejet de l’étranger n’a pas totalement disparu, concentré autour d’un amalgame arabophobe/islamophobe.
En guise d’illustration, notre chère ville de Montpellier défraye la chronique. Il y a quelques jours, à l’hôpital St Eloi, une patiente raillait sa voisine de chambre de confession musulmane en publiant sur les réseaux sociaux une photo d’elle faisant sa prière. Une photo qui a rapidement fait l’objet de commentaires supposément humoristiques à caractère raciste. L’affaire s’est soldée par des excuses à la victime alors que la direction de l’hôpital se désolidarisait des propos tenus par le biais d’un communiqué de presse. Mais qu’en est-il quand des propos à caractère raciste, des comportements violents à l’encontre des individus issus de l’immigration maghrébine ou encore des chants nazis sont diffusés dans l’indifférence générale au sein d’une administration ? C’est l’objet de la récente alerte du site d’information Médiapart sur la SNCF et notamment sur le service de sûreté générale (SUGE) de Montpellier.
Le racisme, considéré comme un délit en France, fait malheureusement encore l’objet de nombreuses infractions, et ce 30 ans après la marche pour l’égalité.