Le Conservatoire Régional de musique : les virtuoses de l’ombre
Ce mardi 7 janvier, au Carré Sainte-Anne, les élèves du Conservatoire régional de Montpellier agglomération sont venus exposer au public leurs compositions musicales. Cette ancienne église néogothique désacralisée est désormais un lieu consacré à l’art contemporain.
Un hommage à un compositeur de musique
Habitués aux chansons à succès avec trois accords qui tournent en boucle dans nos têtes, ce concert musical du conservatoire régional de Montpellier est d’un tout autre registre. Entre les bruits d’insectes amplifiés, les jeux de variations sonores des bruits de tous les jours et les instruments que l’on a l’habitude de voir… On se laisse totalement emporter par ce type de musique, qui sort vraiment de l’ordinaire. Vous pouvez vous rassurer, en terme d’originalité, si vous assistez à une de ces représentations musicales.
Avant de commencer la représentation, c’est l’enseignant Christophe De Coudenhove qui prend la parole pour une petite introduction, en nous exposant le programme et le type de compositions réalisées. On peut distinguer trois genres musicaux principaux : la composition de musiques instrumentales, la composition mixte et la composition d’œuvres acousmatiques. C’est cette dernière qui est la plus atypique puisqu’elle n’utilise aucun instrumentaliste et qu’elle est généralement composée à partir d’enregistrements de sons. Cet événement est d’ailleurs un hommage à Bernard Parmegiani, un compositeur français de musique électroacoustique, décédé en novembre dernier.
Pour aborder un petit peu les termes techniques, cet enseignement au conservatoire s’intéresse à l’acousmonium, qui est la disposition de différents haut-parleurs dans l’espace pour que la qualité du son soit optimisée au maximum. C’est un peu comme regarder un film en 3D.
Christophe nous confie qu’« aujourd’hui, nous avons 32 haut-parleurs de qualités différentes, répartis judicieusement autour du public pour que la musique soit optimisée au maximum. Derrière ça, il y a la résonance naturelle de l’église qui a ajouté un mystère à l’interprétation. »
Les compositions des élèves du conservatoire
C’est Maxime Gaze, élève de première année de cycle trois, qui ouvre le spectacle avec son œuvre Prisme. Avant de commencer, l’élève nous explique ce qui a inspiré son œuvre, c’est-à-dire la décomposition de la lumière blanche en un spectre coloré. Une fois la description terminée, les instrumentalistes se répartissent tout autour du public et commencent à jouer au rythme des coups de baguette du chef d’orchestre. Il est certain que le cadre magnifique du Carré Sainte-Anne ajoute un sentiment mystique à l’interprétation des musiciens.

Vibraphone
(Crédit Photo : © Simon Botteau)
C’est au tour de Brice Ramondenc de nous présenter sa composition musicale. De son nom In Abtuptum Ferri, cette œuvre est écrite pour quatre instruments graves : la clarinette basse, le basson, le trombone basse et la contrebasse. Avant que les musiciens ne se mettent à jouer, l’artiste nous indique qu’il « essaye de faire jouer les instruments graves dans leur extrême aigu et, d’autre part, de faire en sorte que les instruments semblent être soudés les uns aux autres par l’utilisation de petits intervalles et de nombreux unissons. ». La concentration était telle lors de la performance que l’on sentait qu’ils étaient essoufflés à la fin du morceau.
Les élèves se succèdent et c’est au tour de Raphaël Loche, élève de cycle trois, de venir sur scène pour présenter sa composition mixte Orion, qui associe un clarinettiste avec un monde sonore qui semble être très différent de la clarinette. Les sons électroniques qui accompagnent la clarinette sont faits avec des objets de tous les jours et donnent un côté hypnotique à l’oeuvre. Pour imager, cela ressemblait à de la science-fiction auditive. En fermant les yeux, on avait l’impression d’être dans l’espace.
C’est un élève Chinois Fei Guo, venu en France étudier la musique au conservatoire de Montpellier, qui clôturera les compositions faites par les élèves. Il présentera pour la première fois une composition acousmatique, Ballet imaginaire. Pour réaliser cette œuvre, il a notamment utilisé des sons d’instruments issus de la culture chinoise. Décidément, la musique acousmatique et ses sons futuristes qui se perdent dans les hauteurs de l’ancienne église impressionnent…
Julien Guillamat, un ancien élève qui rend hommage à Bernard Parmegiani
Compositeur de musique électroacoustique, Julien Guillamat a obtenu un master de Musicologie et même un doctorat en Composition. Il a travaillé avec de nombreux ensembles instrumentaux tels que le Groupe de musique contemporaine de Birmingham ou encore l’Opéra national du Pays de Galles. Il revient en France en 2013 et fonde, à Montpellier, l’orchestre de haut-parleurs KLANG acousmonium dont il est le directeur.
Il nous présente tout d’abord une de ses œuvres, Le goût des larmes, composé en juin 2013 et inspiré du célèbre tableau de René Magritte. Il défini cette œuvre comme « une sorte de voyage transcendant sur une île habitée par une sorte de dieu mi-homme mi-oiseau enraciné dans un sol aride. Résigné et soufrant, il se cache des atrocités humaines derrière un rideau ».
Dans le cadre de ses compétences en interprétation des musiques acousmatiques sur acousmonium, Julien a rencontré et interprété plusieurs fois les œuvres de ce grand compositeur français qu’est Bernard Parmegiani. Il reprend, pour terminer ce concert, La roue ferris de ce maître incontournable des sons qui a inspiré une grande partie de la nouvelle génération d’auditeurs et de musiciens. N’oublions pas que la portée de sa musique a une aura internationale.
(Crédit photo de Une : © Montpellier Agglomération)