Gilets Jaunes : les femmes contre la violence à Montpellier
Les femmes Gilets Jaunes occupent le devant de la scène en ce début d’année 2019. Après les récentes violences à Paris et ailleurs, des marches de femmes s’organisent pour donner une image pacifique du mouvement et retourner aux sujets essentiels. Alors que toute la manifestation samedi dernier à Montpellier se déroule dans le calme et la bonne humeur, la journée s’achève tout de même avec les bombes lacrymogènes.
À 14h, une foule d’environ 900 personnes marche depuis la mairie, le long du Lez vers le centre-ville en chantant et bavardant. De temps à autres, cela crie: « Macron t’es foutu, les femmes sont dans la rue ! »
Même si l’événement est intitulé « marche féminine du peuple en colère », les hommes ne sont pas pour autant exclus. Christelle* qui travaille pour la Métropole insiste sur le fait que tout le monde est le bienvenu. Il y a une ceinture de sécurité, les femmes se tiennent devant, les hommes derrière. « On est justement là pour qu’il n’y ait pas de casseurs, et que la marche se passe bien » dit-elle.
#ActeIX la marche des femmes #GiletsJaunes de passage sur la place de l’Europe #Montpellier pic.twitter.com/dGZDJVLwcQ
— LeNouveauMontpellier (@LeNouveauMtp) 12 janvier 2019
Deux groupes s’opposent
La police apparaît uniquement lors de l’arrivée à la Préfecture. En chemin, la foule a grandi de 900 à 1500 personnes et les tensions montent sur la petite place face aux CRS. Un petit groupe semble être venu spécialement dans l’espoir qu’il y ait de l’action. Contrairement aux Gilets Jaunes, ils sont prêts avec des protections pour les yeux et des masques pour la bouche.
Les gens violents sont une minorité qu’on met en épingle pour discréditer ce mouvement.
Un homme grimpe sur le portail du bâtiment de la Préfecture, et le secoue en criant. D’autres l’acclament, et se joignent à lui. Quatre femmes et deux hommes interviennent, et s’interposent entre les personnes en colère et le portail. Parmi elles, Pauline*, une enseignante.
« Les gens violents sont une minorité qu’on met en épingle pour discréditer ce mouvement. Il y a de la propagande gouvernementale, et les médias se font un grand plaisir, en particulier les médias télévisés, à la diffuser, » lance-t-elle.
« Je refuse qu’on donne des outils aux médias pour faire cet amalgame Gilets Jaunes = casseurs. » Elle demande comment l’on peut parler d’un mouvement violent, quand il s’agit de 15 personnes face à des milliers et elle ne comprend pas pourquoi l’on ne montre que cela.
Pour elle, c’est une stratégie gouvernementale visant à empêcher le soutien de la population : « Il est important qu’on ait le soutien populaire. Je suis intervenue pour que ce mouvement ne soit pas décrédibilisé. »
Betty*, 23 ans, intermittente du spectacle, n’est pas contre la violence : « Tant qu’il n’y a pas de violence, rien ne bouge. » Elle précise qu’elle n’est pas pour la violence physique, mais matérielle, comme bloquer les centres de commerce.
On ne va plus en boîte, on va à la Com’
À 17h30, la manifestation est officiellement terminée. De nombreux Gilets Jaunes sont partis ; c’est néanmoins maintenant qu’un groupe de jeunes construit une petite barricade en face des CRS, avec des panneaux de bois et des briques cassées. Dans la foule qui observe, une fille plaisante : « On ne va plus en boîte, on va à la Com’ (Place de la Comédie). »
Les bombes lacrymogènes volent, et les gens commencent à courir. Le centre-ville est enfumé jusqu’au soir, et les ‘Street-Medics’ qui ont accompagné le mouvement jusque là sont sollicités. Encore un succès pour ceux qui espéraient des images sensationnelles.
Opinions et solutions de femmes Gilets Jaunes
Malgré cela, la marche était une occasion pour faire entendre sa voix, spécialement celle des femmes.
Quand les femmes sont dans la rue, ça veut dire qu’on est arrivés à un certain danger, à une urgence.
Annick et Marylen*, retraitées, expliquent que la plupart des femmes ont des emplois précaires comme aide à domicile, garde d’enfant ou ménage. Souvent, elles doivent conduire d’un domicile à l’autre. Une situation terrible, surtout à la campagne.
« Les femmes sont très présentes dans le mouvement depuis le début, le 17 Novembre, » dit Marylen. « Quand les femmes sont dans la rue, ça veut dire qu’on est arrivés à un certain danger, à une urgence. »
À côté de la critique du gouvernement et d’une politique dans laquelle les gens ne croient plus, des solutions sont proposées sur des changements possibles.
« On voit que tout n’est pas bon dans le système libéral. Il y a beaucoup de précarité. Donc on est venues au RIC : référendum d’initiative citoyenne, » argumente Charlotte Klepec, 34 ans, mère d’un enfant, étudiante en DUT de gestion des entreprises. Le RIC est un moyen pour les citoyens de participer plus activement et directement à la politique. « On a besoin d’un système horizontal, et non pas pyramidal. »
Il y a deux ans Charlotte voulait quitter la France. Beaucoup de jeunes veulent quitter le pays car la situation aujourd’hui est difficile, dit-elle. On « délocalise », en montant par exemple une entreprise au Maroc. « Moi, je suis à moitié marocaine. Là-bas ça bouge économiquement aussi, alors pourquoi pas… Mais c’est vrai que d’un autre côté, on laisse pourrir le pays. » Elle est heureuse de voir qu’en France les gens se soulèvent pour changer les choses.
*Plusieurs personnes dans l’article ont préféré ne pas donner leur nom de famille, pour éviter des risques éventuels liés à la participation au mouvement.